Produire autrement dans l'élevage bovin

Voici du grain à moudre concernant le thème de cette année. Un rapide tour d'horizon du sujet est ici fait.
Si la partie élevage sera développée en priorité, nous accorderons quelques lignes sur les cultures telles que les fourrages et les céréales qui composent les rations des bovins.
Par ailleurs, cette thématique "Produire autrement" est mise en avant par le ministère de l'agriculture depuis maintenant deux ans. On retrouve sous cette bannière des programmes tels qu'Eco-phyto ou encore Eco-antibio qui visent à réduire l'emploi de pesticides et d'antibiotiques dans les exploitations agricoles.

Cette démarche visant à produire autrement doit permettre à l'agriculture de s'adapter aux changements environnementaux, mais aussi à continuer d'assurer des niveaux de production élevés tout en préservant les ressources. Pour cela, cette démarche doit s'appuyer sur les trois piliers du développement durable.

Tout d'abord le pilier économique. Les exploitations vont évoluer dans le sens de l'agrandissement des structures. D'une part en raison de la fin des quotas laitiers, mais aussi en raison de la diminution du nombre d'exploitations. On estime qu'à l'horizon de 2025, la taille moyenne d'une exploitation laitière sera de 120 vaches laitières pour une production annuelle d'environ 1,050 million de litres. Cette augmentation de taille, implique la mise en places d'aménagements en conséquence qui sont coûteux. Par exemple une nouvelle salle de traite, des bâtiments adaptés avec des systèmes de logettes. De tels investissements ne pourront être réalisés qu'à condition de maximiser la marge brute ou le chiffre d'affaire par euros investi. Une autre façon de peser sur la partie économique de l'exploitation est de transformer une partie de la production à la ferme. Ensuite la vente directe permet de recentrer la transformation à proximité des bassins de consommation. D'autant plus que cela permet aux agriculteurs de maîtriser les prix de vente et assure un revenu supérieur en raison de la diminution des intermédiaires de transformation.



Cette nouvelle manière d'envisager la production intervient aussi dans le pilier social du développement durable. En effet, la vente directe permet la création d'emplois. Par exemple, la Ferme de Grignon emploie 3 nouvelles personnes depuis 2013. D'autre part, l'augmentation de la tailles des troupeaux va favoriser des systèmes d'élevage collectif tels que les G.A.E.C. (Groupement Agricole d'Exploitation en Commun). Toutefois, ce point implique de revoir la manière dont seront effectuées les formations des futurs agriculteurs et salariés agricoles.
On retrouve ici un pan du thème Produire autrement qui est Former autrement. L'acquisition des compétences nouvelles sera dispensée grâce à de nouvelles connaissances. Et l'enseignement agricole a un rôle primordial à jouer ici. Cet enseignement pourra s'appuyer sur les exploitations des lycées agricoles qui constitue un outil pédagogique d'exception. Un exemple est la mise en places d’expérimentations sur les systèmes fourragers innovants.

On arrive alors au troisième pilier du développement durable qui est lié à l'environnement. Pour cela, l'agriculture a à sa disposition divers facteurs technologiques qui permettent une meilleure efficacité environnementale.
Fenaison dans le parc de Grignon
Concernant les systèmes fourragers, la part faite aux légumineuses doit augmenter afin de couvrir les besoins en protéines de manière durable (autonomie en azote). Les légumineuses grâce à leurs nodosités captent le diazote atmosphérique. Cela permet d'améliorer l'autonomie alimentaire des troupeaux. Par exemple l'introduction de luzerne sous forme de foin et/ou d'ensilage permet une bonne fourniture en azote des rations. La ferme de Grignon en cultive environ 40 hectares. Cette plante présente aussi des nombreux atouts agronomiques tels que la fourniture d'azote aux cultures suivantes, mais aussi le nettoyages des adventices grâces aux fauches répétées (jusqu'à 4 par an). De plus les expérimentations menées sur les émissions de méthane montrent que la quantité produite par vache est inférieure avec une ration à base de luzerne qu'avec une ration très riche en maïs ensilage. Aussi, il existe d'autres leviers agronomiques qui entrent au services de la production de fourrages plus respectueuse de l'environnement. Par exemple le binage du maïs permet de réduire les doses d'herbicides épandues, de même que des rotations longues et équilibrées en cultures de printemps et d'automne. 
Binage du maïs
Enfin, la fertilisation du maïs uniquement grâce au lisier produit par les vaches permet de diminuer les besoins en azote et en phosphore minéraux et de limiter ainsi le production de CO2. Les engrais azotés de synthèse en particulier sont produit selon un processus industriel très coûteux en gaz et pétrole.
Une nouvelle manière de produire implique également une réduction des frais vétérinaires et en particulier de la consommation d'antibiotiques. De plus, l'augmentation de la longévité des vaches laitières est un point essentiel à améliorer sur les fermes. L'objectif est d'augmenter le nombre moyen de lactation par vache.



Enfin, en guise de conclusion l'élevage occupe une place primordiale au sein des agrosystèmes. L'ultra-spécialisation des productions par bassins de production doit être revue. En effet, l'association d'élevage et de cultures permet de garantir un meilleur approvisionnement en fourrages et céréales et les effluents épandus améliorent la fertilité des sols. Produire autrement implique donc des changements dans l'ensemble des systèmes de production. Produire autrement dans l'élevage bovin va de paire avec une revue des pratiques de production végétale, mais aussi avec des nouvelles pratiques de gestion de la biodiversité (haies, agro-foresterie dans des systèmes herbagés, bandes enherbées).











Deux jeunes diplômés d’AgroParisTech ont mis au point un système de méthanisation basé sur une bâche membrane installée au fond d’une fosse à lisier, capturant ainsi le biogaz à moindres frais.
BMP - 511.5 ko
Il est neuf heures du matin, la ferme expérimentale de Grignon est en activité depuis un moment déjà. Jeoffrey Moncorger et Remy Engel nous accueillent à proximité de la fosse à lisier de l’exploitation. Ces deux jeunes diplômés d’AgroParisTech sont les cofondateurs de Nénufar, une start up qui propose un produit innovant pour le milieu agricole.
Début 2012, Jeoffrey fait à vélo un tour d’Europe des exploitations. Il remarque que des bâches sont souvent utilisées sur les fosses à lisier pour empêcher la pluie de diluer le fertilisant sans pour autant récupérer le biogaz qui s’en dégage naturellement. En étape à Bucarest, il croise la route de Rémy, camarade de promotion ayant déjà eu des expériences professionnelles autour de la méthanisation. Ils échangent leurs points de vues et créent Nénufar, de retour en France, en septembre 2012.

Un système innovant et rentable

L’innovation apportée par l’entreprise porte sur la membrane déposée sur le lisier. Profitant de la présence obligatoire des fosses à lisier dans les exploitations laitières (grâce au plan nitrates de 92), la membrane est une bonne alternative à la construction d’une unité de méthanisation classique, beaucoup plus onéreuse. L’investissement pour un système Nénufar est en effet compris entre 50 000 et 100 000 euros suivant la taille de la fosse à lisier, alors qu’une unité classique de méthanisation demandera un investissement de 300 000 à trois millions d’euros suivant sa taille.
BMP - 350 ko
Le lisier accumulé dans la stabulation est transféré vers la fosse
Grâce à des flotteurs, la bâche est parfaitement étanche et peut stocker le précieux méthane qui fait la particularité du biogaz. Ils permettent une mobilité de la bâche dans la fosse, ce qui facilite l’accès aux pompes des épandeuses à lisier. Le méthane est ensuite acheminé de la fosse vers les bâtiments. Contrairement aux unités de méthanisation les plus courantes, le biogaz n’est ici pas transformé en électricité : il est utilisé pour produire de la chaleur par combustion.
La membrane limite la propagation des mauvaises odeurs, tout en récupérant l’eau de pluie qui pourra être réutilisée par l’exploitant. De plus, l’installation automatisée n’exige que peu de temps de travail de la part de l’agriculteur.
L’absence de système de chauffage entraine une variation de la production de biogaz durant l’année, qui est maximale à 38°C. Cela n’empêche pas les économies annuelles de consommation de combustibles d’avoir été estimées à 10 000 euros dans le cas de la laiterie de la ferme expérimentale.
JPEG - 98.9 ko
La mesure indique un taux de méthane satisfaisant de 47%, encore perfectible selon Rémy
©Xavier.Remongin/Min.Agri.fr

Des perspectives de développement intéressantes

« Le Nénufar de la ferme de Grignon est notre premier contrat, mais déjà 5 autres fermes se sont déclarées intéressées par notre système. Les discussions sont en cours. »
Rémy et Jeoffrey ne sont pas les seuls sur le marché de la méthanisation à bas coût. Leurs principaux concurrents sont canadiens et italiens. Comme Nénufar, leurs systèmes respectifs misent sur une membrane couvrant la fosse. La membrane n’est cependant pas directement au contact du lisier mais attachée sur le béton, ce qui peut poser des problèmes de corrosion de ce dernier.
Les deux amis travaillent maintenant à temps plein, et envisagent de recruter une à deux personnes pour les épauler, l’une pour l’installation des Nénufars, l’autre pour le développement commercial de l’entreprise.
De plus, de nouvelles idées germent déjà dans leur esprit :« Nous pensons à deux produits différents, l’un portant sur l’épuration du biogaz jusqu’à 90%, ce qui permettrait son utilisation comme carburant des tracteurs adaptés, l’autre sur la récupération du gaz émis par le fumier »
Vous pourrez retrouver Jeoffrey et Rémy, et échanger avec eux au SPACE à Rennes, du 16 au 19 septembre prochain.




Source: http://agriculture.gouv.fr/Nenufar-la-methanisation

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire