Le rumen, un organe essentiel pour les ruminants mais aussi pour
l’Homme
Le rumen
est un compartiment du système digestif des ruminants. Les fermentations
microbiennes qui y ont lieu permettent de digérer la cellulose, de mieux tirer
parti des matières azotées ou encore de synthétiser des vitamines. Ce
fonctionnement est très intéressant pour l’homme qui élève depuis longtemps des
ruminants et profite des particularités de leur système digestif.
Le
rumen et le réticulum (aussi appelé réseau) forment le premier compartiment du
système digestif. Ils échangent en permanence les matières ingérées et
diffèrent par la structure de leurs parois. Le rumen est aussi beaucoup plus
gros que le réticulum, avec un volume de 100 L pour un bovin de 600 kg. C’est
d’ailleurs la plus grande des poches stomacales. Sa paroi comporte des
papilles. On peut comparer le rumen à une cuve de fermentation anaérobie des
aliments ingérés. Il constitue avec le réticulum et le feuillet les
pré-estomacs des ruminants. Après ces compartiments, le bol alimentaire rejoint
la caillette qui est l’équivalent de l’estomac des monogastriques, puis
l’intestin grêle.
Première
partie de l’appareil digestif des ruminants
m : Œsophage
V : Rumen
n : Réticulum
b : Feuillet
l : Caillette
u : Début de l’intestin grêle
La digestion
des ruminants comprend des cycles de rumination. En effet, le bol alimentaire
est régurgité et remastiqué pendant des heures pour faciliter la digestion.
La rumination
commence quand l’animal est au repos, après avoir mangé. Le bol alimentaire
arrive dans le réticulum après avoir été mastiqué. C’est sa rugosité, perçue
lors du contact avec les parois du réticulum, qui va déclencher la rumination.
Les aliments passent ensuite dans le sac dorsal du rumen où ils subissent les
fermentations microbiennes. Elles sont très intenses au début puis l’activité
microbienne décroît à mesure que les substrats sont fermentés. Puis, les
aliments passent dans le sac ventral. Le rumen se contracte régulièrement
durant ces étapes. Ils sont ensuite expulsés par l’œsophage jusqu’à la bouche
où a lieu la rumination à proprement parler. L’animal mastique beaucoup moins
vite que lors de la première ingestion et éructe en même temps les gaz produits
par les fermentations qui ont lieu dans le rumen. La rumination déclenche la
sécrétion de salive contenant des ions bicarbonates qui vont tamponner le pH du
rumen et éviter ainsi qu’il ne s’acidifie trop suite aux fermentations. Elle
permet de mieux briser les parois végétales et donc de faciliter la digestion.
Elle facilite également les fermentations microbiennes qui ont lieu dans le
rumen.
Ces
fermentations microbiennes sont primordiales et sont la caractéristique la plus
importante de la digestion des ruminants. En effet, le rumen est un
compartiment propice au développement d’une grande quantité de
micro-organismes. Il contient beaucoup d’eau (80 à 90%), a un pH tamponné
autour de 6.5, une température autour de 40°C et reçoit des apports de
nutriments en permanence. On y trouve des bactéries (une dizaine de milliards
par mL) essentiellement anaérobies cellulolytiques, amylolytiques ou
protéolytiques, des protozoaires (environ 1 million de ciliés anaérobies par
mL) et des champignons anaérobies (un millier par mL). Tous ces organismes vont
fermenter les aliments qui arrivent dans le rumen. On estime que 60 à 90% des
glucides ingérés par le ruminant sont fermentés. Les parois cellulosiques
peuvent être transformées par les microorganismes en glucides fermentables
grâce à leur équipement enzymatique. La fermentation des glucides permet aux
organismes de produire de l’énergie sous forme d’ATP pour croître et se
multiplier. Ils produisent également du dioxyde de carbone (CO2), du
méthane (CH4) et des acides gras volatils. Ces derniers, acides
acétique, propionique et butyrique, sont absorbés par le ruminant au niveau des
papilles ruminales. La proportion de chaque acide gras volatil dépend
principalement de la composition des aliments. Ils contribuent à son propre
métabolisme énergétique à hauteur de 80% de l’énergie totale ingérée. C’est une
différence notable avec les monogastriques qui tirent leur énergie des glucides
et lipides absorbés au niveau de l’intestin grêle sans transformation préalable
par des micro-organismes.
Les
protéines ingérées par l’animal sont elles-aussi dégradées par les
micro-organismes. Ils les transforment en ammoniac notamment. Cet ammoniac est
ensuite métabolisé par les micro-organismes qui produisent des protéines microbiennes.
Ils peuvent également tirer parti de l’urée, qu’ils transforment en ammoniac
avant de l’assimiler. Les protéines microbiennes sont équilibrées en acides
aminés essentiels. Lorsque le bol alimentaire parvient à la caillette et à
l’intestin, les microbes sont digérés et leurs protéines absorbées par le
ruminant. Cela constitue un apport en protéines de grande qualité pour
l’animal.
Ainsi, ce
type de digestion propre aux ruminants leur permet de consommer des fourrages
pauvres et des matières azotées de faible qualité. La biomasse produite par les
prairies par exemple peut constituer l’alimentation des ruminants. L’homme peut
alors profiter de cela pour élever des animaux sur des terrains pauvres.
De plus,
grâce aux synthèses protéiques des micro-organismes du rumen, les protéines
animales des ruminants sont très équilibrée en acides aminés essentiels. Leur
consommation est donc intéressante pour l’homme. Le ruminant peut même
« fabriquer » des protéines de très bonne qualité nutritionnelle à
partir d’azote non protéique comme l’urée.
Enfin,
les micro-organismes synthétisent même des vitamines B à partir des aliments
ingérés, elles sont ensuite absorbées par le ruminant et par l’homme qui
consomme leur viande ou des produits laitiers.
Le rumen
est donc le siège d’une digestion particulière dans le règne animal qui permet
au ruminant de tirer parti d’une alimentation riche en fibre cellulosique et
contenant des sources d’azote non protéiques. La symbiose entre les
micro-organismes du rumen et le ruminant a donc des avantages indéniables pour
l’homme. Cependant, ce sont aussi les micro-organismes qui produisent le
méthane éructé dont on connait les conséquences sur l’effet de serre. De plus,
des fermentations trop intenses peuvent aussi provoquer une acidose. Ainsi, les
rations doivent être conçues précisément par les éleveurs pour tirer au mieux
parti du fonctionnement du rumen.
Sources :
- Cours de
1ère année de la formation d’ingénieur AgroParisTech
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